Cambadélis : Le PS ne doit pas se déterminer par rapport aux stratégies des présidentiables mais par rapport aux préoccupations des Français.

La gauche dénonce à l'envi l'effacement du Premier ministre face au président de la République. Mais est-ce un vrai problème?
Jean-Christophe Cambadélis : Nicolas Sarkozy et François Fillon ont tous les deux théorisé un Premier ministre reflet de la pensée du président, ce qui n'est pas un problème en soi. Mais face à ce président tout puissant, il n'y a pas un Parlement réellement opérant. Cela pose un vrai problème de déséquilibre démocratique. Et ça ne pourra pas durer comme cela... Il est urgent, vu le fonctionnement du président, que le Parlement, conquière ou reconquière son pouvoir.
A gauche, plusieurs responsables disent beaucoup de bien de Nicolas Sarkozy...
En effet. Il ne faudrait pas que le PS passe de l'opposition frontale à la droite à la cohabitation globale avec celle-ci. Nous voulons une opposition constructive, mais certains de mes camarades sont touchés par le syndrome de la mandoline pro-Sarko. La gauche doit garder son indépendance. Nous devons revendiquer une opposition de projet, mais aussi le refus de nous intégrer dans le système Sarkozy.
Au PS, tout le monde n'a que le mot «refondation» à la bouche. Que faut-il faire pour rénover ce parti?
Il faut prendre le problème à bras-le-corps, et se fixer d'abord comme objectif de revoir notre déclaration de principe, celle qui fonde le parti socialiste. Pensez donc: il n'y a pas un mot sur l'écologie, ni sur la mondialisation, ni sur le marché, encore moins sur le précariat, et nous restons accrochés à cette idée: «Le réformisme doit être au service des espérances révolutionnaires». La question économique est totalement absente, quant à l'Europe, la formulation est totalement défensive. Nous devons tout revoir, expliquer en quoi notre but est celui d'une société juste, que notre moyen est celui du compromis, que nous voulons être social en économie, écologistes pour la société, et libéral dans nos moeurs.
Il faut prendre le problème à bras-le-corps, et se fixer d'abord comme objectif de revoir notre déclaration de principe, celle qui fonde le parti socialiste. Pensez donc: il n'y a pas un mot sur l'écologie, ni sur la mondialisation, ni sur le marché, encore moins sur le précariat, et nous restons accrochés à cette idée: «Le réformisme doit être au service des espérances révolutionnaires». La question économique est totalement absente, quant à l'Europe, la formulation est totalement défensive. Nous devons tout revoir, expliquer en quoi notre but est celui d'une société juste, que notre moyen est celui du compromis, que nous voulons être social en économie, écologistes pour la société, et libéral dans nos moeurs.
Le processus de rénovation engagé par François Hollande au dernier conseil national ne le permet pas?
Non, c'est une question d'état d'esprit. L'époque des motions attrape-tout portées par un présidentiable est finie. C'est un frein à la refondation. Le PS ne doit pas se déterminer par rapport aux stratégies des présidentiables mais par rapport aux préoccupations des Français.Je veux pouvoir voter avec un ami de Ségolène Royal sur l'Europe, et avec un ami de Laurent Fabius sur les salaires. Nous devons sortir de nos ghettos et nous intéresser davantage aux réponses qu'aux positionnements.
Non, c'est une question d'état d'esprit. L'époque des motions attrape-tout portées par un présidentiable est finie. C'est un frein à la refondation. Le PS ne doit pas se déterminer par rapport aux stratégies des présidentiables mais par rapport aux préoccupations des Français.Je veux pouvoir voter avec un ami de Ségolène Royal sur l'Europe, et avec un ami de Laurent Fabius sur les salaires. Nous devons sortir de nos ghettos et nous intéresser davantage aux réponses qu'aux positionnements.
Le rituel même de vos congrès ne le permet pas...
C'est pour cela qu'il faut changer jusqu'au rituel des congrès! Il faut que les Français s'y retrouvent. Et pas seulement parce que nous rajeunissons ou parce que nous avons une direction qui représente la société, mais parce que nous aurons publiquement et courageusement abordé les problèmes qui les tenaillent. Le PS, s'il pense demain et congédie hier, peut rapidement redevenir ce qu’il a déjà été la force attractive moderne de notre société.
Propos recueillis par Nathalie Segaunes pour la Parisien