La Poste ressoude la gauche

Publié le par SD32

Le million ! La mobilisation contre l’ouverture du capital de La Poste sonne comme une victoire miraculeuse pour les leaders de la gauche. Le chiffre de la participation est annoncé par avance, nul ne sait s’il sera réellement atteint, mais l’essentiel est de sentir le parfum du succès. La Verte Cécile Duflot a voté, hier après-midi, devant la mairie de Villeneuve-Saint-Georges, en banlieue parisienne, où elle est conseillère municipale. Laurent Fabius au Grand-Quevilly, près de Rouen. Olivier Besancenot, dans son bureau de poste de Neuilly, avec ses collègues. Martine Aubry a voté ce matin à Lille, devant la mairie centrale, et Jean-Luc Mélenchon, devant l’Hôtel de Ville de Paris.

La Poste, ou le plaisir d’être ensemble pour des partis de gauche d’ordinaire si divisés. « C’est un mouvement aussi important que le référendum contre la Constitution européenne en 2005. Et cette fois, le PS s’en est emparé, on ne va pas cracher dessus », se félicite Olivier Besancenot. Tous y vont de leur anecdote. « C’est un vrai phénomène de société », s’enthousiasme Razzy Hammadi, secrétaire national du PS aux services publics. « La semaine dernière, une dame de 84 ans nous a appelés pour organiser la votation dans son village de Haute-Corse. Elle n’avait pas milité depuis l’après-guerre. » Besancenot veut y voir une « leçon de chose » politique. L’unité de la gauche s’est faite après des mois de réunions pour lever les appréhensions. A l’extrême gauche, certains reprochaient encore au Parti socialiste d’avoir trop privatisé lorsqu’il était au pouvoir. Ils ont découvert un PS différent en entendant Razzy Hammadi faire son mea culpa. « Le PS a fait des erreurs sur les services publics, mais je ne vais passer les vingt prochaines années à m’excuser des vingt dernières », a-t-il répété en boucle. Et les syndicalistes, notamment chez Sud, ont bien compris que la mobilisation des socialistes comme celle des communistes, des Verts ou du Parti de gauche renforceraient la campagne.

Pour réussir ce mouvement social, il a aussi fallu trouver un mot d’ordre unique et fédérateur : non à la privatisation de La Poste. Un mot d’ordre en décalage avec le projet de loi, qui n’évoque pas l’entrée de capitaux privés, sans non plus l’interdire. Mais il permet d’unir les salariés et les usagers, même s’il ne reprend pas la liste des revendications catégorielles des postiers.

Le refus de la privatisation est dans l’air du temps, quand le président de la République ne veut plus croire aux vertus uniques du tout-marché. « Le système marche sur la tête, cela finit par s’incarner », explique Cécile Duflot. La patronne des Verts y va, elle aussi, de son couplet citoyen.

« La Poste, c’est du lien social. Les Français ont compris que la libéralisation n’entraînait ni une amélioration des services ni une baisse des prix. Regardez les renseignements téléphoniques, depuis la suppression du 12, c’est plus cher et moins pratique. » L’évolution de France Télécom a marqué les esprits. « Pour les salariés, mais aussi pour les usagers, ce qui se passe chez nos cousins des télécoms est dans toutes les têtes », témoigne Besancenot.

Les élus des petites communes, attachés à leur bureau de poste, ont, eux aussi, été mis à contribution, au-delà des étiquettes politiques. « La Poste, c’est un emblème familier. C’est là que tu as tes économies, que tu touches ta pension, que tu vas chercher tes colis », énumère Jean-Luc Mélenchon, pour qui la mobilisation est « exemplaire ». « La Poste, c’est ce qui reste quand il n’y a plus rien », lâche Besancenot, définitif.

Quelle que soit la participation réelle, la votation s’annonce comme une réussite pour la gauche, qui rêve de transformer l’essai en œuvrant pour l’organisation d’un vrai référendum d’initiative populaire, ce que permet le changement constitutionnel. L’opposition a d’autres sujets en tête pour se battre, ensemble, contre le gouvernement. Sur La Poste, ou sur l’hôpital, la SNCF, les services publics… Ou contre la réforme des collectivités locales, un combat que veulent mener les socialistes. Un référendum sur ce thème avait coûté sa place au général de Gaulle en 1969. « Chiche ! » lance Laurent Fabius.

 

Source le JDD

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