L'apothéose virtuelle de Dominique STRAUSS-KAHN

Publié le par SD32

dsk-pittsburg.jpegIl fut naturellement l'absent le plus présent à l'Université d'été du Parti socialiste : Dominique Strauss-Kahn ne pouvait pas se trouver à La Rochelle, ses fonctions de directeur général du Fonds monétaire international le lui défendant absolument.


Socialisme & Démocratie 32 reproduit la chronique d' Alain DUHAMEL publiée dans les Dernières Nouvelles d'Alsace, hier matin, peu avant l'intervention de Martine AUBRY, en clôture de l'Université d'été de La Rochelle.

 

L'APOTHÉOSE VIRTUELLE DE DOMINIQUE STRAUSS-KAHN

par Alain DUHAMEL

 

      Le contrat de Dominique Strauss-Kahn stipule qu'il s'interdit toute initiative ou même tout commentaire relevant de la politique française. S'il passait outre, il lui faudrait démissionner sur-le-champ. A vingt mois de l'élection présidentielle, alors qu'il lui reste en théorie deux années avant d'achever son mandat, l'hypothèse est donc exclue.
 Cela n'empêche en rien son ombre de planer sur la rentrée politique du PS. Même si Martine Aubry va dominer les travaux et prononcer ce matin un discours de clôture qui sera forcément très offensif, même si la première secrétaire sera ovationnée par des militants trop heureux de l'entendre pourfendre Nicolas Sarkozy, le scénario Strauss-Kahn demeure la grande inconnue, la principale variable de la stratégie socialiste, voire, bon gré mal gré, de l'opposition de gauche tout entière.

La pluie de sondages apparaît homogène

      La pluie de sondages qui accompagne rituellement la fin de la trêve politique estivale apparaît en effet pour une fois homogène. Nicolas Sarkozy traverse une zone de forte dépression, même si l'électorat UMP lui demeure dans l'ensemble fidèle. François Fillon devient de plus en plus un stabilisateur nécessaire. Le parti socialiste récolte les fruits de cette phase turbulente où les polémiques sur la sécurité s'ajoutent au fort mécontentement lié à la crise. Tous les prétendants du PS bénéficient de cette situation nouvelle qui voit les Français espérer en majorité l'alternance, même s'ils ne croient pas que la gauche au pouvoir ferait mieux que l'équipe actuelle. Parmi les présidentiables socialistes, certains tirent cependant leur épingle du jeu mieux que les autres. Au premier rang d'entre eux, c'est Dominique Strauss-Kahn le vainqueur.


 On dira naturellement qu'il s'agit d'une apothéose virtuelle. On aura à la fois raison et tort. Il est exact que la candidature de Dominique Strauss-Kahn relève actuellement de la politique fiction. Les sondages d'intention de vote en faveur de l'ancien ministre de l'Économie et des Finances sont euphoriques - celui de la SOFRES pour Le Nouvel Observateur lui attribue même 59 % des suffrages au second tour de l'élection présidentielle face à Nicolas Sarkozy - mais ce ne sont que des sondages.

Les rapports de force peuvent encore être bouleversés

      Toutes les enquêtes d'opinion mesurant la présidentiabilité des prétendants socialistes le privilégient largement mais ce ne sont que des enquêtes d'opinion. Les expériences passées prouvent qu'à vingt mois du vote réel, les rapports de force peuvent encore être bouleversés et radicalement inversés. DSK ne fera connaître ses intentions qu'au printemps prochain. D'ici là, tous les scénarios relèvent donc de la littérature.


 Cela ne les empêche pourtant pas d'exercer une influence concrète et immédiate. Les partisans de Dominique Strauss-Kahn, nombreux en particulier parmi les grands élus du PS, se sentent évidemment des ailes et se trouvent confortés dans leur détermination à faire respecter le calendrier et les modalités des primaires qui doivent désigner le candidat socialiste à l'élection présidentielle : en clair, ils n'accepteront pas que les échéances soient avancées pour gêner Dominique Strauss-Kahn, comme certains dirigeants en ont la tentation.

Un désir de vote-sanction

      Par ailleurs, le fait que l'an prochain les électeurs de gauche choisiront le candidat du PS - ceux, en tout cas, qui le souhaitent - et non plus les militants donne plus de poids aux sondages qui mesurent justement l'opinion des citoyens et non pas les préférences des militants. Si les sondages restent aussi favorables à Dominique Strauss-Kahn, s'ils persistent à lui accorder une nette avance sur ses rivaux, ses rivales et ses adversaires, les primaires iront très vraisemblablement dans le même sens, sauf s'il renonçait à se présenter.


 Il est vrai que les mêmes sondages qui encouragent le directeur général du Fonds monétaire international donnent également des espérances à Martine Aubry, voire à François Hollande ou à Ségolène Royal. Tous profitent largement de l'impopularité actuelle de Nicolas Sarkozy et du désir de vote-sanction qui s'exprime en raison notamment des conséquences sociales de la crise. La première secrétaire du PS se voit gratifiée d'un 53/47 flatteur face au président de la République, certes loin derrière le score de Dominique Strauss-Kahn mais assez haut pour l'encourager à tenter sa chance. Ses fonctions à la tête du parti légitiment cette hypothèse.


 Son discours de ce matin l'installera encore davantage dans son rôle de leader naturel de l'opposition. Si Dominique Strauss-Kahn possède une image plus présidentielle et plus rassembleuse que la sienne (notamment vis-à-vis de l'électorat du centre et de la droite), elle incarne comme personne aujourd'hui la famille socialiste dans sa dimension la plus combative et la plus oppositionnelle.


 Au cas où DSK renoncerait, François Hollande apparaît de plus en plus comme le principal challenger de Martine Aubry. A son brio et à sa jovialité bien connue il ajoute désormais des propositions de fond originales qui le présidentialisent progressivement. Reste que si Dominique Strauss-Kahn annonce sa candidature à un moment où les sondages le placent clairement en tête, il sera bien difficile aux autres prétendants de lui barrer le chemin.

Publié dans Parti Socialiste

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