Où est la remise en cause du dogme !
On le voit bien, chacune des interventions de Dominique Strauss-Kahn dans les médias est non seulement attendue, grandement suivie mais aussi décortiquée malicieusement par celles et ceux qui cherchent plus particulièrement à dénaturer ses propos pour le discréditer.
Vieille méthode parfaitement connue qui consiste à vouloir faire dire à quelqu'un ce qu'il n'a jamais dit !
Ainsi interviewé dans À vous de juger hier au soir par Arlette Chabot, le directeur général du FMI a consenti à s’exprimer sur un seul sujet purement de politique intérieure , celui des retraites. Et qu’a-t-il dit alors de si choquant ? En parlant de la retraite à 60 ans, Dominique Strauss-Kahn a précisé : "je ne pense pas qu'il faille y avoir de dogme. Le monde change très vite et on vit dans la mondialisation, qui a des avantages, des inconvénients, mais c'est la réalité et il faut tenir compte de cela".
Haro sur "le dogme" se sont empressés de dire certains, avides de sortir les mots de leur contexte.
Mais savent-ils de quoi ils parlent ? Le dogme, du grec δόγμα (dogma), « opinion », est une affirmation considérée comme fondamentale, incontestable et intangible par une autorité politique, philosophique ou religieuse .
Dominique Strauss-Kahn n’a, en aucune manière, remis en cause le "maintien de l’âge légal de départ à 60 ans", une "garantie pour ceux qui ont atteint leur durée de cotisation" et une "protection pour les salariés usés par le travail ", comme le précise le Parti Socialiste dans ses propositions.
Dominique Strauss-Kahn nous a parlé de l’âge social de départ à la retraite et c’est tout autre chose : en matière de retraites, "il y a plusieurs façons de faire les choses: une manière qui est assez évidente dans beaucoup de pays, c'est de dire si on vieillit plus longtemps, il faut qu'on travaille plus longtemps". Et "si on arrive à vivre 100 ans, on ne va pas continuer à avoir la retraite à 60 ans, il va bien falloir que d'une manière ou d'une autre, cela s'ajuste. Dans beaucoup de pays, c'est la voie qui est choisie".
Quant à l’âge de départ à la retraite , il "est très différent selon les individus et les professions". "Selon que vous faites des carrières différentes, vous commencez plus ou moins jeune d'ailleurs (...). Et selon que vous faites un métier plus ou moins pénible, la justice c'est qu'à l'arrivée, vous puissiez prendre votre retraite plus ou moins tôt " Et à quel âge? " Ça dépend, si l'espérance de vie augmente, il va bien falloir d'une manière ou d'une autre ajuster tout ça ".
Dominique Strauss-Kahn a plus plaidé pour une "différenciation ", "parce que les vies ne sont pas les mêmes: il y en a qui sont plus usés, plus fatigués, et d'autres qui, au contraire, peuvent continuer à travailler assez âgés, beaucoup plus âgés qu'on ne l'aurait imaginé il y a dix ou vingt ans."
Rien de nouveau pour un homme qui s’est toujours battu, bien avant d’autres, pour la prise en compte de "la pénibilité".
Où est la remise en cause du dogme !
Et ces propos de Dominique Strauss-Kahn, en quoi sont-ils si différents de ceux de Marisol Touraine, secrétaire nationale du PS chargée notamment du dossier des retraites : " nous voulons encourager la retraite choisie. La référence, c’est le droit de partir à 60 ans : c’est une protection, une garantie, une liberté pour ceux qui sont usés par le travail, ont eu une vie difficile : je rappelle qu’à 60 ans, les ouvriers ont une espérance de vie de 7 ans plus courte que les cadres ! Toucher aux 60 ans, c’est s’attaquer aux plus modestes. En Allemagne, dont le gouvernement nous parle tout le temps, on peut partir à la retraite après 35 années de cotisation. En même temps, on doit dire qu’il n’est pas anormal que, vivant plus longtemps, nous travaillions davantage. Au moins ceux qui le peuvent, qui le souhaitent : à chacun, en fonction de son parcours, de son envie, de sa situation de faire le choix, d’arbitrer entre du temps et une retraite plus élevée. Oui, il faudra que globalement les Français partent plus tard en retraite : certains à 60 ans, voire avant, d’autres plus tardivement ".
Philippe PUGNET