Pour ou contre DSK ?

Publié le par SD32

Voilà une question récurrente qui interpelle surtout lorsqu'elle concerne Dominique STRAUSS-KAHN, un homme de gauche qui rassemble sur son nom 65 % d'opinions favorables chez l'ensemble des français et près de 80 % chez les seuls sympathisants du Parti socialiste.

Une question également très importante car elle n'est pas sans influence sur l'approche de la prochaine élection présidentielle de 2012 et une éventuelle candidature de Dominique STRAUSS-KAHN au nom du Parti socialiste, si ce n'est de la gauche .

Nous reproduisons ici le débat entre Pierre MOSCOVICI et Jean Luc MELENCHON publié dans L'Express de cette semaine.

Souhaitons que cette confrontation aboutisse le moment venu à un consensus pour faire gagner la gauche en 2012 avec celui qui pourrait être son meilleur candidat alliant réalisme, compétence et efficacité.

Philippe PUGNET

 

Face à face

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Jean-Luc Mélenchon, iriez-vous jusqu'à dire que Dominique Strauss-Kahn est de droite?

Jean-Luc Mélenchon : Il est membre du PS et a été ministre du gouvernement de Lionel Jospin. Au nom de quoi pourrais-je lui contester son appartenance à la gauche ? Mais, à côté de ce qu'il est, il y a ce qu'il fait au FMI. Et là, son bilan n'est pas de gauche. Il aggrave la traditionnelle politique de brutalité sociale et d'aide à la prédation financière de ses prédécesseurs au FMI. Un homme de droite ne s'y prendrait pas autrement.

Pierre Moscovici : Je suis en total désaccord. Je ne suis pas le porte-parole de Dominique Strauss-Kahn, mais je peux vous dire qu'il n'a pas changé depuis l'époque où je l'ai eu comme professeur d'économie : c'est un keynésien. En clair, il est pour l'économie de marché, mais il pense qu'il ne faut pas attendre du marché qu'il parvienne spontanément au plein-emploi. D'où la nécessité d'injecter des liquidités pour alimenter la croissance. Il a transformé le FMI en augmentant les ressources "prêtables" jusqu'à 860 milliards de dollars, dont 17 sont consacrés au développement de l'Afrique. Il a proposé la création d'un "fonds vert" doté de 100 milliards de dollars d'ici à 2020. La Grèce va recevoir du FMI 30 milliards d'euros et des prêts à 3,5 % d'intérêt, alors que les marchés les proposent à 18 % et que la France et l'Allemagne prêtent à 5 %. En plus, le FMI participe au fonds de stabilisation pour sauver l'euro à hauteur de 250 milliards d'euros.

J.-L. M. : Dans tous les pays où le FMI est passé, de la Lettonie à la Roumanie, en passant par la Hongrie ou la Grèce, l'intervention de cette institution s'est traduite par une diminution du nombre de fonctionnaires, des coupes dans les salaires, l'allongement de l'âge de départ à la retraite et l'augmentation des impôts indirects. Comme redistribution keynésienne, pardon, mais il y a mieux!

Dominique Strauss-Kahn est-il un social-démocrate ou un social-libéral ?

J.-L. M. : Il aimerait être un social-démocrate, mais c'est un social-libéral.

P. M. : On a actuellement besoin de régulation, de relance intelligente et d'une réforme du système international. Trois principes sociaux-démocrates, que partage Dominique Strauss-Kahn.

Quel regard portez-vous sur son bilan à la tête du ministère de l'Industrie (1991-1993) et du ministère de l'Economie et des Finances (1997-1999) ?


J.-L. M. : Son bilan, c'est d'abord celui de Lionel Jospin. Je retiens de son passage à Bercy l'impôt extraordinaire sur les grandes sociétés, qui a permis de récolter 70 milliards de francs, réinjectés dans la consommation. Au final, les comptes sociaux étaient passés au vert. Et l'activité avait repris. En 2001, j'étais ministre de l'Enseignement professionnel. Je me souviens que les patrons se battaient pour trouver de la main-d'oeuvre qualifiée et pourvoir des emplois. Cela a bien changé!

Pourquoi n'évoquez-vous pas les 35 heures ?

J.-L. M. : Parce que ce n'est pas son oeuvre. Il était favorable en 1995 à la semaine de 37,5 heures. Je peux en témoigner : j'ai lutté pendant dix ans avec l'aile gauche du PS pour que soit adoptée la semaine de 35 heures sans perte de salaire.

P. M. : Jean-Luc Mélenchon a raison. Les 35 heures ne sont pas une idée de Dominique Strauss-Kahn. C'est une coproduction, dans laquelle des militants longtemps minoritaires ont joué un rôle déterminant. Je le reconnais: Michel Rocard, DSK, Laurent Fabius et moi-même étions pour une forme de compensation salariale partielle. Mais Dominique Strauss-Kahn a su faire preuve d'intelligence politique. Il n'est jamais interdit d'emprunter les idées des autres quand elles sont justes.

Ajoutons aussi qu'il a sorti 350 000 jeunes du chômage, grâce aux emplois jeunes. Il a mené une politique macroéconomique très habile de relance de la consommation et de réduction de la dette publique. Les Français n'ont pas oublié cette époque où une gauche réaliste menait de grandes réformes sociales. C'est ce qui explique la cote élevée de Strauss-Kahn dans les sondages.

Peut-on sauver le capitalisme à Washington et le socialisme à Paris ?


P. M. : Le FMI n'est pas là pour sauver le capitalisme, mais pour aider les pays en crise à sortir de l'ornière. Et un président de la République de gauche n'est pas là pour diriger une France socialiste, mais pour changer le cours des choses, avec ses partenaires. En 2012, il faudra faire une politique de gauche très réaliste, poursuivant une ambition crédible. Si la gauche se pose en donneuse de leçons, comme elle l'a souvent fait dans son histoire, elle risque de se fracasser contre la réalité.

J.-L. M. : Je plaide, moi, pour une vraie rupture, qui consisterait à reprendre le pouvoir à la finance. De gré, si possible. De force, si cela n'est pas possible, par le biais de la loi. Il faudra, entre autres, constituer un pôle financier public. Dans cette période de nécessaire confrontation avec la finance mondiale, la question est de savoir qui aura suffisamment de cran pour entrer dans un rapport de forces. Un responsable qui aura été, pendant cinq ans, l'organisateur en chef des politiques d'austérité dans tous les pays ne me semble pas le mieux placé pour faire exactement l'inverse, au nom de la France.

P. M. : Au contraire, quelqu'un qui connaît bien le système est peut-être mieux à même de se faire entendre et de proposer des options différentes et crédibles.

Pierre Moscovici, comment réagissez-vous quand des leaders de gauche critiquent DSK ?

P. M. : Jean-Luc Mélenchon a dit un jour que les socialistes seraient "barjots" de choisir DSK. Ne disons rien qui puisse insulter l'avenir et compromettre le nécessaire rassemblement de 2012 autour d'une candidature probablement socialiste. S'il est le candidat du PS à la présidentielle, ce sera avec lui que vous devrez traiter. Et c'est avec vous, dans votre diversité, qu'il devrait discuter des conditions du rassemblement.

J.-L. M. : Je déteste ce terrorisme intellectuel qui veut interdire le moindre débat parce que le PS aurait une collection de vaches sacrées que nous devrions faire semblant d'admirer le moment venu. Strauss-Kahn est un candidat potentiel du PS. Or, le PS est le premier parti de l'opposition. Tout le monde à gauche doit pouvoir dire ce qu'il en pense. Nous préparons une élection, pas un sacre.

Des détracteurs de Dominique Strauss-Kahn raillent son train de vie et son salaire au FMI. Pensez-vous que cette question puisse poser problème pour une éventuelle candidature ?

J.-L. M. : Ce genre d'arguments me met mal à l'aise. On a connu de grands bourgeois de gauche et des prolétaires d'extrême droite. Bien sûr, la condition sociale joue un grand rôle dans la perception de l'existence, mais on ne peut pas réduire un homme à cela.

P. M. : Je rejoins Jean-Luc Mélenchon dans le refus de la disqualification des personnes. Léon Blum était d'une famille aisée et a beaucoup fait pour la gauche. Ce qui compte, c'est la compétence et le parcours.


Publié dans Politique

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E
<br /> est il possible de sortr de ce clivage gauche droite ou les gens de gauche seraient competents et ceux de droites deplorables et vice versa.si dsk est elu en 2012 se sera la victoire de la<br /> competence et non de la gauche et la mise en place de references economiques realistesface au defits de la mondialisation.Il me semble que les sondages sont autant favorable a dsk pour les<br /> electeurs de droite ou de gauche<br /> <br /> <br />
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